Saint-Jean-Eude

Il n’était pas questions pour les animateurs du projet de laisser ce quartier ouvrier en dehors de la religion catholique qui avait encore beaucoup de puissance à cette époque. Le nouveau quartier dépendait religieusement de la paroisse Saint-Hilaire qui était beaucoup trop loin. Il ne fallait pas non plus envisager de le desservir à partir de l’église Notre-Dame des Anges de Bihorel. Le curé de Saint-Léger-du-Bourgdenis, l’abbé Maubec, avait été désigné par l’archevêque pour prendre en charge le quartier érigé en une nouvelle paroisse. Mais il lui fallait une église. Le presbytère fut construit grâce à un généreux donateur qui voulut rester anonyme. Le curé commença son ministère dans une chapelle provisoire élevée sur un terrain prêté par le Foyer Ouvrier. Mais ce n’était pas suffisant. Il lui fallait une vraie église.
La première pierre en fut posée en 1926. D’abord appelée Saint-Jean des Sapins, elle a été dédiée à Saint-Jean Eudes qui venait d’être canonisé, en 1925. Ce saint était l’aîné d’une famille de sept enfants.

Le père Maubec en définit le programme, l’architecte fut Robert Danis et l’entrepreneur Georges Lanfry. Le financement a été assuré d’une façon originale. En dehors de généreux donateurs (comme la famille du curé Maubec, industriels à Elbeuf), on lança des souscriptions, en particulier pour la décoration. On pouvait acheter un pavé en céramique (40 frs), une station du Chemin de Croix (1.000 frs) ou même une tessère de la mosaïque absidale (25 frs).
C’est une construction faisant appel à la brique, au silex et au béton, dans un style qui se rapproche du style byzantin.
Son plan est en forme de croix latine. Une courte nef précède le transept, octogonal, qui est couvert d’une immense coupole. A l’origine, cette coupole était percée de multiples petites ouvertures obturées par des éléments en verre, ce qui éclairait largement l’intérieur de l’édifice. Mais la technique n’était pas au point et le dôme subit longtemps des infiltrations qui ne firent que s’accentuer au cours du temps. La succession de dilatations et de rétractations due aux changements de températures mit même en péril la sécurité intérieure, les cabochons de verre menaçant de tomber.

Dans les années 1954-1960, on entreprit de modifier la couverture en supprimant le verre et en couvrant le dôme par des feuilles de cuivre. Pour éclairer le transept, des oculi ont été percés et fermés par des vitraux dus à Bernard Legrand.
On a d’abord construit la crypte qui se trouve sous le monument. Elle contient les fonds baptismaux et un autel.
Le clocher est accolé à l’église. Il mesure 32,5 m de haut et utilise les mêmes matériaux que l’église. C’est une sorte de phare, un repère qui domine le plateau et se voit de loin. Sur chaque face, une horloge surmonte des motifs dus au sculpteur Pierre Seguin.

Il comporte une chapelle dans sa partie basse et une autre chapelle dédiée aux Saint Michel et Georges en sa partie supérieure. Il ne contient qu’une seule cloche.On entre par un grand portail occidental. Des motifs réalisés avec les briques rouges ornent les côtés. Le tympan et la partie supérieure sont ornés d’une mosaïque réalisés avec des silex noirs et blancs.
Le chœur est surmonté d’un arc en ogive.
L’église a été bénie le 10 juin 1928.
L’église a failli disparaître à la fin des années quatre-vingt dix du siècle dernier. L’aggravation de son délabrement, sa sous utilisation faillirent amener sa destruction. Les autorités religieuses ne disposaient pas de l’argent nécessaire à la mise en sécurité et ne s’y opposaient pas. Une mobilisation des défenseurs du patrimoine amena son inscription comme monument historique le 26 octobre 1998. Elle a été restaurée entre 1998 et 2003.

 
Mobilier
Dans la crypte, un autel provenant de l'église Saint-Nicaise avait été installé en 1947. Considéré comme inadapté, il a été démoli. Il ne subsiste que la bas-relief de La Cène qui a été placé sous le tabernacle. Le bas-relief du Sacrifice d'Abraham et les anges qui ornaient l'autel ont été mis dans un dépôt municipal.
Le mobilier est résolument moderne
 
Décor
L’intérieur est très décoré, dans le style Art Déco de l’époque. On a fait appel à des artistes comme Marcel Imbs ou Jean Gaudin .
Tout l’intérieur en est décoré d’une mosaïque de M. Imbs datant de 1933, représentant le Christ bénissant le monde. Il est entouré de saint jean Eudes, saint Jean-Baptiste de la Salle, sainte Jeanne d’Arc, sainte Thérèse. Il est à noter que tous ont appartenu à des familles nombreuses.
L'autel porte les trois vertus : Foi, Charité et Espérance.
La grande croix est du sculpteur Robert Busnel.

 
Vitraux
Des vitraux modernes ornent certaines ouvertures. Ils ont été créés par Bernard Legrand.
Dans la crypte, un vitrail est consacré à la Vierge. Il porte l'inscription "Vierge Marie, Priez pour nous, Veillez sur nous"

 
Cloches
Le clocher ne contient qu'une seule cloche. C'est une cloche de récupération. Elle avait été fondue pour rendre hommage aux soldats d'un commune (inconnue) morts pour la France. Les noms ont été meulés, mais l'image d'un fantassin subsiste. De l'autre côté figure le Christ en Croix.
La cloche porte le nom de baptême de Michel. Elle mesure entre 31 et 68 cm de diamètre sur une hauteur de 54 cm. Elle pèse 270 kg.
Elle a été restaurée en avril 2016 par les bénévoles de l'association de sauvegarde.
 
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Bibliographie
Saint-Jean des Sapins, Bulletin Religieux, 18/10/1924, p. 976-978.
La future église Saint-Jean-Eudes,
Bulletin Religieux, 16/10/1926, p.997-668.
Bénédiction de la première pierre de l'église Saint-jean-Eudes,
Bulletin religieux, 30/10/1926, p.1045-1046, 20/11/1926, p.1114-1116.
L'Eglise Saint-jean-Eudes,
E. Maubec, 1925.
Journal de Rouen, 30 octobre 1926, p.2.
Bulletin Religieux de Rouen,
3 novembre 1927.
Le coq de l'église Saint-Jean des Sapins,
Colette Yver, Bulletin Religieux, 4/5/1929, p. 409-411., 1/6/1929, p. 513.
La chapelle haute Saint-Michel à l'église Saint-Jean des Sapins,
Bulletin Religieux, 30/4/1932, p. 372-373.
Rouen, Ville d'art et d'Histoire, Eglises, chapelles et cimetières à travers les âges
. Edgard Naillon, T. 1, 1936
Eglises de Rouen, E. Naillon, 1941, p. 211-216.
XXeme, un siècle d'architectures à Rouen,
P. Quéréel, 2001, p. 110-111.
Visite de la CDA à l'église Saint-Jean-Eudes
, BCDA, L, 2002, p. 85-88.
L'architecture du 20e siècle dans l'agglomération rouennaise, Agglo de Rouen, 2002, p.182.
Rouen Insolite et Secret, Tome II,
Jacques Tanguy, 2011, p.42-43.
Eglises et chapelles de Rouen, un patrimoine à (re)découvrir, J. Vivier, E. Laurenceau, AMR, 2017, p.114-119.

© Copyright Jacques Tanguy, février 2013