Chartreuse de la Rose, puis de Petit-Quevilly

C’est l’archevêque de Rouen Guillaume de Lestranges qui avait fondé l’établissement des Chartreux rouennais. Les comptes des ses exécuteurs testamentaires montre combien il était attaché à leur ordre. Il comptait sur le bon exemple qu’ils ne manqueraient pas de donner pour élever la qualité spirituelles des clercs de son diocèse. Pour les établir, il avait acheté en 1406, une propriété dans la vallée de Darnétal, le manoir de Jehan du Val Richer, non loin d’un ancien domaine des ducs de Normandie appelé le Nid de Chien.
L’église conventuelle était encore inachevée à la mort du fondateur, le 2 mars 1388, à Gaillon
.

Vers 1404, le chantier était en voie d’achèvement mais ce ne fut qu’en mars 1409 que l’église fut dédiée.
Pendant le terrible siège de 1418-1419, les Chartreux furent expulsés et leur monastère servit de quartier général au roi Henri V d’Angleterre.
La paix revenue, les bâtiments furent relevés, en particulier grâces aux libéralités de l’archevêque Georges Ier d’Amboise.
En 1562 la chartreuse subit les habituels ravages des protestants. En 1592, elle pâtit encore des opérations de sièges de l’armée royale contre la ville ligueuse. La communauté ne comptant plus qu’une quinzaine de membres, il fut décidé en novembre 1683 de la fusionner avec la chartreuse de St-Julien au Petit-Quevilly, elle-même formée de la fusion de la chartreuse de Gaillon et du monastère de Ste-Catherine par le cardinal Charles Ier de Bourbon.
L’ensemble de la chartreuse représentait une surface de près de six hectares. Il était complètement clos par un impressionnant mur de pierre représenté par Jacques Le Lieur dans son livre des Fontaines.
Il y avait un petit cloître au sud de l’église. Il était lambrissé et garni de vitres peintes. Au nord se trouvait l’église et une construction en pan de bois de vaste dimensions. Lucien René Delsalle a proposé d’un voir le manoir des Val Richer, où Guillaume de Lestrange s’était réservé un appartement. Ce bâtiment avait disparu au XVIIe siècle. Sur les autres côtés, diverses constructions devaient servir de réfectoire, salle capitulaire, logis du prieur,…
Vers l’est, une grande cour ornée d’une fontaine était bordée sur trois de ses côtés par des maisonnettes entourée par un petit jardin. Il s’agissait des “cellules” des chartreux, au nombre de quinze sur un dessin de la Bibliothèque Municipale de Rouen. Au centre de ce grand cloître de près de 70 mètres de côté, il y avait le cimetière de la communauté.
Le dessin de Le Lieur montre deux églises. La plus importante était l’église conventuelle. Cette petite chapelle était ouverte aux femmes et aurait pu être la chapelle des Val Richer, anciens propriétaire du domaine.
L’église conventuelle était orientée. Elle mesurait 48 mètres de long sur 8,5 mètres de large. Elle avait six travées et un chevet plat. Elle était éclairée au nord par quatre hautes fenêtres. Au niveau du chœur, un bras de transept (ou une chapelle ?) éclairé par une grande fenêtre étaient accolé au nord. Contre lui se trouvait une sacristie.
Un clocher en charpente recouvert de plomb surmontait son faîte à la charnière de la nef et du chœur.
La chapelle ouverte aux femmes avait des dimensions bien restreintes, un peu plus de 9 mètres de longueur pour 8 mètres de largeur. Elle avait peut-être été dédiée à saint Hugues.
La plus grande partie des constructions de la chartreuse ont disparu au XVIIe siècle quelques années après le transfert au Petit-Quevilly. Quelques vestiges de murs de l’enclos existent encore. Le seul bâtiment qui subsiste avec ses murs épais percés de fenêtres a servi de séchoir au XIXe siècle. Son identification avec le réfectoire ou la salle capitulaire est loin d’être assurée. Après avoir longtemps servi à des fins industrielles, il faillit disparaître à la fin du siècle dernier. D’autres constructions ont été victimes de la construction de la voie rapide qui traverse maintenant le quartier, en particuliers le lavoir qui se trouvait sur le bord d’une petite rivière, la Clairette.
Quelques pierres de maisons voisines sont certainement issues de l’enclos des Chartreux.
 
Clergé
En 1770, le clergé se composait de 12 personnes :
10 religieux-prêtres
2 frères.
 
Mobilier
Le mobilier de la chartreuse a du être transféré à St-Julien lors de l’union des deux monastères.
Le seul élément qui puisse être rattaché à l’établissement est une statue de Notre-Dame-de-la-Paix (exposée depuis 1953 dans l’église St-Hilaire de Rouen) qui peut dater de la fin du XVIIe ou du début du XVIIIe siècle.
 
Tableaux
Chartreuse de la Rose :
Un tableau de Michel I du Joncquoy, Le Christ mort sur la Croix, avait été commandé par M. de Franqueville. Il n'a jamais été posé dans l'église de la Chartreuse car le Chapitre de la Cathédrale obtint de l'acheter pour 400 écus. Il figure toujours à l'entrée de la chapelle Saint-Etienne de la Cathédrale.

Le Christ mort sur la Croix

Bruyères Saint-Julien :
Les tableaux d'Adrien Sacquespée Saint Bruno en oraison, de 1678, et Chartreux du Mont Saint Bernard ensevelis sous la neige sont conservés au Musée des Beaux Arts. Le tableau Saint Bernard au Concile d'Etampes est dans l'église Saint-Nicolas du Chardonnet à Paris.

Saint Bruno en oraison Chartreux du Mont Saint Bernard ensevelis sous la neige Saint Bernard au Concile d'Etampes
 
Vitraux
Des vitraux sont signalés en Angleterre en 1808 (25 panneaux). Ils contenaient une histoire des ermites.
 
Localisation


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Bibliographie
Histoire de la ville de Rouen, F. Farin, 3e ed., 1738, t. V, p. 371-382.
Abrégé de l'histoire ... de la ville de Rouen, Lecoq de Villeray, 1759, p. 413--415.
 
Dictionnaire géographique, historique et politique des Gaules et de la France, J. J. Expilly, Tome VI, 1770, p. 442.
Description historique des maisons de Rouen,
E. de la Quérière, 1821, p.259. T. II, 1841, p. 278.
Notes historiques sur le Musée de peinture de la ville de Rouen,
Charles de Beaurepaire, B.C.D.A., 1852-1853, p. 425.
Répertoire archéologique du départ. de la S.-Inf., Abbé Cochet, 1871, col, 381.
Note sur la destruction de l'église de la Chartreuse de la Rose, Ch. de Beaurepaire, Bull. CDA, 1897-1899, p. 508-511.
Abbaye Notre-Dame-de-la-Rose, La Croix de Seine-inférieure, 26 spt 1848, p.2
Tableaux français du XVIIe s. et italiens des XVIIe et XVIIIe s. P. Rosenberg, 1966, p. 115 et 116.
Des vitraux rouennais retrouvés en Angleterre, F. Perrot, Bull AMR, 1976-1977, p. 35.
La Chartreuse de la Rose Notre-Dame, L. Delsalle, Bull. AMR, 1983, p. 17-44.
La peinture d'inspiration religieuse à Rouen au temps de Pierre Corneille, E. G. Picat, 1984, p. 151-153, 156.
La Chartreuse de la Rose Notre-Dame et la peinture d'inspiration religieuse au temps de Pierre Corneille
, L. Delsalle, BCDA, 1984-85, p. 185-194.
Vitraux disparus de Rouen, F. Perrot, Précis Acad., 1985-1986, p. 342.
Chartreuse de la Rose : démolition du mur d'enceinte, J. Gosselin, Bull. AMR, 1988, p. 100.

Rouen aux 100 clochers
, F. Lemoine et J. Tanguy, 2004, p. 106-107.
Rouen Insolite et Secret, J. Tanguy, t. II, 2009, p. 34-35.

© Copyright Jacques Tanguy, février 2013